01. Steam (5:57) 02. Obsession (7:53) 03. Abstract:Peace (4:13) 04. What U Expect! (8:14) 05. Abstract:Tide (3:47) 06. Feather (2:32) 07. You Nod but You Ain't (5:09) 08. Drums Take Over (4:19) 09. Sound Barrier (3:08) |
Date de sortie : 11 septembre 2020 Antoine Pierre (batterie, compositions); Jean-Paul Estiévenart (trompette); Bram De Looze (piano) Bert Cools (guitare, électroniques); Félix Zurstrassen (basse électrique); Fred Malempré (percussions) + Invités : Ben Van Gelder (saxophone alto); Reinier Baas (guitare); Jozef Dumoulin (Fender Rhodes, électroniques) Enregistré live en janvier 2020 à Flagey, Brussels Jazz Festival, Belgique. |
Chronique
Après deux albums en studio quasiment parfaits, le collectif Urbex conduit par le batteur Antoine Pierre, ici élargi par trois musiciens invités, propose un nouvel album, live cette fois, mais avec quand même un nouveau répertoire. Enregistré en direct sur la scène de Flagey en janvier 2020 pendant le Brussels Jazz Festival où le leader était l'artiste en résidence, Suspended captive immédiatement par un son et une énergie qui rappellent de grands souvenirs à ceux qui, comme moi, ont eu la chance d'écouter Miles Davis au festival de l'ile de Wight en 1970. Steam qui ouvre l'album ne laisse planer aucun doute : c'est Bitches Brew qui est ici évoqué à travers cette composition modale colorée par des claviers électriques et portée par le tempo souple et obsédant d'une rythmique lancinante. Comme celle de Miles, la trompette de Jean-Paul Estiévenart plane au-dessus de l'intense mêlée, délivrant des phrases ciselées à la perfection mais aussi des nervures électrisantes comme savait si bien le faire son aîné afro-américain. Rarement, à mon sens, on ne s'est approché aussi près de l'œuvre électrique, culte mais toujours controversée (on adore ou on déteste), du Prince des Ténèbres. Obsession retrouve une esthétique plus conforme à celle d'Urbex. Spatiale et atmosphérique avec un brin d'électronique, mais aussi plus classique avec un thème mélodique qui revient épisodiquement en se déployant sur un vaste mouvement ordonné par une batterie toujours aussi complexe et volubile. Encore plus hypnotique, Abstract:Peace porte bien son nom : ce morceau installe lentement une paix abstraite dont les ramifications se perdent comme les fils de couleur dans un tableau de Jackson Pollock. Comme par magie, ce titre se fond dans le suivant, What U Expect!, qui synthétise le meilleur des deux mondes, celui d'Urbex et celui du Miles électrique de Bitches Brew (avec quand même un peu de l'atmosphère d'In A Silent Way combinée à celle du premier album éponyme de Weather Report). On sent l'hommage mais pas seulement. Le collectif parvient à créer des ambiances qui lui sont propres et le faire ainsi sur scène n'est certainement pas donné à tout le monde. Il faut rappeler que les disques historiques auxquels il est ici fait référence ont tous été enregistrés en studio, peaufinés et largement édités par un producteur qui leur a donné leur forme définitive. You Nod But You Ain't relève encore de la galaxie Miles. Habillé d'électronique, ce morceau laisse apparaître la force et la cohésion du groupe dont tous les solistes déchaînés entremêlent des phrases découpées au cutter avec un virtuosité qui fait plaisir à entendre. Drums Take Over tient la promesse de son titre : Antoine Pierre y délivre … un solo de batterie mais sans esbrouffe, plutôt en racontant une histoire d'ailleurs épicée par quelques notes éparses de claviers. Et le concert se termine sur Sound Barrier qui monte crescendo jusqu'à la coda et les applaudissements du public. Certes, voici une musique qui prend son inspiration dans les arcanes du passé, mais elle regarde aussi de façon décapante, savante et insolente vers l'avenir. Suspended plaira donc aussi bien aux nostalgiques du Miles électrique qu'aux amoureux d'un jazz actuel et polychrome qui tomberont vite sous le charme de son impact "soniquement" incorrect. Grand moment d'écoute assuré ! [ Chronique par Pierre Dulieu ] |
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