Retour du Brussels Jazz Orchestra, Big Band emmené par le saxophoniste alto Frank Vaganée, toujours aussi rutilant et explosif, fier comme une parade de cirque et fort de ses 16 musiciens comptant pour la plupart parmi la crème de la scène Jazz belge. Conçu selon la tradition des Big Band de la période swing, L’orchestre est composé d’une section de saxophones (reeds) : deux altos, deux ténors et un baryton doublés en fonction des arrangements par des sopranos ou des flûtes ; d’une section de cuivres (brass) avec 4 trombones (dont trois ténors et un trombone basse) et 4 trompettes (parfois mutées) et enfin d’une section rythmique avec piano, contrebasse et batterie. Evidemment, les techniques d’enregistrement ayant considérablement évolué depuis les années 40, la production est immaculée et le son éclatant fuse des baffles telle la lave éructée par un volcan en éruption. Les anches et les cuivres retrouvent ici une nouvelle jeunesse et jaillissent avec allégresse dans l’espace sonore contemporain tout en gardant une conscience acérée de l’impact collectif et terrifiant que pouvait avoir sur l’auditeur un de ces antiques Big Band chauffé à blanc. Même les arrangements n’oublient pas les formes classique explorées par le passé telles ces chorus en 32 mesures de Mr Iron, Stone, Wood And I, un morceau académique essentiellement dédié à des improvisations marathon de Bart Defoort au ténor et de Bo Van Der Werf au baryton suivies d’une autre plus ramassée par la pianiste Nathalie Loriers désormais aussi célèbre pour son côté lyrique que pour ses capacités à générer un swing clair et sensuel. C’est elle aussi que l’on retrouve en solo étendu sur Seasonned, une excellente composition très habillée en forme de ballade issue des September Sessions (Werf, 1999) où elle remplace Christoph Erbstösser, délivrant un jeu aéré tout en souplesse et élégance qui procure à l’ensemble un côté relaxant et poétique. L’orchestre revisite d’ailleurs d’autres thèmes du passé comme Languorous Ballad (Two Trios, 1999) ou cet incroyable The Blue Goose datant de 1995 et que n’aurait pas renié l’orchestre de Count Basie dans son époque glorieuse : on notera en passant le solo de trompette mutée par Nico Schepers qui s’envole avec majesté sur un écrin orchestral conçu avec finesse et retenue. L’une des pièces les plus mémorables de cet album est encore ce Walking Away (issu lui aussi du répertoire de Two Trios) avec ces échanges incessants entre solistes tous plus vivaces les uns que les autres qui font de cette composition une véritable tournerie endiablée qu’on ne se lasse pas de réécouter. Voici de la musique qui fait bouger les pieds et réveille l’esprit. Puissant et contrasté, le Brussels Jazz Orchestra est aujourd’hui une machine rôdée dont la musique n’a plus rien de l’aspect un peu formel des exercices d’autrefois (réécoutez l’album Radio 3 de 1997 pour saisir la différence) : le lyrisme est présent, les explosions sont ludiques, les improvisations brûlantes, les arrangements luxuriants et le plaisir d’écoute est tout simplement intense.

On notera que le digipack renferme un petite carte avec un numéro de code donnant accès à une partie protégée du site du BJO sur laquelle il est possible de télécharger en une opération non renouvelable quatre compositions supplémentaires de Frank Vaganée au format MP3 (qualité CD) : A Bronx Morning - Part I - The Bronx Does Business, A Bronx Morning - Part II - They live On The Street, A Bronx Morning - Part III - Children Playing, Eating Icecream et A Luscious Moment.