Bobby Jaspar & His Modern Jazz (BMG / Vogue), 1954 - 1955. Trois facettes d'un musicien exceptionnel : l'arrangeur marqué par les sessions de Miles Davis connues sous le nom de Birth Of The Cool, le compositeur intéressé par les idées novatrices du français André Hodeir, et l'interprète inspiré par le son de Stan Getz et le jazz de la Côte Ouest. Bobby souffle dans son saxophone, un oeil fixé sur l'Amérique et ses géants qu'il va bientôt côtoyer. A écouter en lisant le savant ouvrage de Jean-Pol Schroeder : Bobby Jaspar - Itinéraires d'un jazzman européen (1926 - 1963), édité chez Mardaga. [ Disco ] [ Ecouter / Commander ce CD ] [ Commander le livre Bobby Jaspar ]
Jean Thielemans : Man Bites Harmonica (Riverside / OJCCD), 1957. Thielemans n'a pas enregistré que des disques de jazz mais celui-ci en est un. Un vrai. Une blowing date avec des musiciens de l'école post-bop comme Pepper Adams (bs), Kenny Drew (p), Wilbur Ware (b) et Art Taylor (dr), enregistrée à New York alors que Toots était encore membre du quintette de George Shearing (1953 - 1959). Le baryton d'Adams se combine merveilleusement et pour la première fois aux harmoniques du petit orgue de bouche (mouth organ) tandis que l'harmonica chromatique à trois octaves de Jean Toots Thielemans accède sans complexe au statut d'instrument à vent à part entière. En plus, ce compact permet d'entendre Toots improviser à la guitare sur trois titres, ce qui n'est finalement pas si courant. [ Commander ]
Kenny Clarke - Francy Boland Big Band : Three Latin Adventures (MPS), 1968. Cette année là, le grand orchestre Clarke-Boland, qui existe depuis 1962, est au sommet de sa puissance, exhibant une cohésion et une vitalité maximales. C'est le moment idéal pour enregistrer ces trois longues suites ( Latin Kaleidoscope, Cuban Fever et Fellini 712), éditées à l'époque sur deux LP, et ici regroupées sur un seul compact d'une durée de 74 minutes. Bolland s'occupe des harmonies et Kenny Clarke alimente en charbon le foyer de cette rutilante locomotive traînant avec elle des solistes inspirés comme Benny Bailey et Dusko Gojkovic (tp), Ronnie Scott, Johnny Griffin et Phil Woods (saxophones), Sahib Shihab (fl), Ake Persson (tb) sans oublier Jean Warland à la contrebasse. Voilà l'occasion de réentendre enfin dans les meilleures conditions possibles l'un des plus passionnants big bands de jazz de l'après-guerre.
Michel Herr : Intuitions (Igloo), 1989. La principale charactéristique de cet album est sa fluidité. La musique coule comme une source, fraîche et changeante. Aux mélodies accomplies et à la grande musicalité du pianiste s'ajoute encore un facteur d'excellence : le jeu du contrebassiste hollandais Hein Van de Geyn à qui on a laissé suffisamment d'espace pour s'exprimer. Avec un tel trio en état de grâce, pas étonnant que ce disque ait reçu en son temps le Prix Sax octroyé par les critiques belges au meilleur disque de l'année. A noter que le Premier Prix du Concours International de Composition de Thèmes de Jazz à Monaco a aussi été attribué au morceau Labyrinthe. A part cela, écoutez un peu Le Voyage Oublié ou Pretext et dites-moi si ce ne sont pas là les expressions d'une vraie rencontre comme le jazz seul sait en offrir. [ Disco ] [ Commander ]
Eric Legnini : Natural Balance (Jazz Club), 1991. Avant de devenir un sideman apprécié aux côtés d'Eric Le Lann ou des frères Belmondo et membre permanent du groupe de Stefano Di Battista, Legnini produisait des disques remarqués avec son trio composé de Jean-Louis Rassinfosse à la contrebasse et de Stéphane Galland (ou Bruno Castellucci) à la batterie. Entre les compacts Essentiels (Igloo) et Antraigues (Quetzal), et avant le fameux Rhythm Sphere avec Joe Lovano, le pianiste a enregistré celui-ci en Hollande qui nous permet d'entendre, outre des reprises d'Ellington, de Jerome Kern et de Wayne Shorter, six compositions personnelles aux qualités rythmiques ( Les grandes plaines de là-bas) et harmoniques ( Cadence d'un geste) incontestables. [ Disco ] [ Commander ]
Charles Loos - André Donni : Unknown Mallow (Igloo), 1995. Dans l'oeuvre du pianiste, on a le choix entre les disques en solo, en duo et en trio. Pour ma part, j'aime bien celui-ci, enregistré en quartette, avec Philippe Aerts (b), Rick Hollander (drs) et le jeune saxophoniste et clarinettiste André Donni. Aux ritournelles magnifiquement ciselées de Charles Loos qui se rattachent au courant des musiques classique et folklorique occidentales ( Unknown mallow, Holy Kazoly), viennent s'ajouter une composition de Billy Strayhorn ( Chelsea Bridge) et quelques titres plus marqués par la tradition du jazz ( Dig the blues, Theme for Leo). Il en résulte un album à la couleur musicale floue, quelque part entre entre le rose et le bleu, ou alors mauve intergalactique à l'instar de l'étrange pochette. [ Commander ]
Bart Defoort Quartet : Moving (De Werf), 1997. Un disque énergique et plein de swing par le saxophoniste ténor d'Octurn qui propose ici sept compositions personnelles et l'apaisante ballade Darn that dream de Van Heusen en finale. Avec Nicolas Thys (b), Gene Calderazzo (drs) et le piano cristallin d' Eric Vermeulen qui donne de bien belles couleurs scintillantes aux thèmes du leader. [ Commander ]
Aka Moon : Elohim (Carbon 7), 1997. Aka Moon à la croisée des chemins entre les rythmes africains et les percussions indiennes. Aka Moon qui renforce l'aspect mélodique de ses compositions en invitant des musiciens extérieurs à son univers comme Marc Ducret à la guitare, David Linx au chant, ou Eric Legnini au piano. Aka Moon enfin, qui recentre sa musique autour d'arrangements à l'efficacité redoutable. Trois bonnes raisons, auxquelles on ajoutera le fabuleux titre The River Blue qui en constitue à lui seul une quatrième, pour se ruer sur cet album résolument moderne et définitivement indispensable. [ Disco ] [ Commander ]
Bruno Castellucci Quintet : Lost And Found (Quetzal), 1997. Le dernier album de Bruno Castellucci a été choisi par la Sabena comme accompagnement musical sur le canal jazz. Quand on l'écoute, on comprend pourquoi : ce CD moderne, agréable et varié est un sans faute que l'on peut réécouter en boucle pendant des heures. Avec Dieter Ilg (b), Stan Sulzmann (ss, ts), Uli Beckerhoff (tp, bugle) et, au piano, l'excellent John Taylor, qui fit partie jadis du John Surman Quartet. [ Disco ]
Ivan Paduart : Belgian Suites
(A-Records / Challenge), 1997. Après une dizaine d'albums joliment marbrés d'interventions de musiciens aussi prestigieux que Richard Galliano, Toots Thielemans, Jean-Marie Ecay, Philip Catherine ou Tom Harrell, le pianiste belge Ivan Paduart propose huit nouvelles compositions soigneusement arrangées et toujours marquées par cette attirance pour un monde liquide que l'on imagine tout bleu ( Precious Moments). Pourtant, en faisant appel pour la deuxième fois au saxophoniste Bob Malach, authentique requin de studio qui fut jadis le compagnon de Bob Mintzer et de Ben Sidran, il introduit dans son univers un élément perturbateur : un son de ténor musclé qui l'entraîne ici et là sur la vague plus écumeuse d'un bop ( Sherry On A Cake) qui se fait même parfois funky ( Between Heaven And Earth). Du coup, sa musique se colore en des teintes plus chaudes d'autant plus qu'elle se trouve être propulsée par l'une des plus belles rythmiques du moment : le tandem magique Hein Van de Geyn - Hans van Oosterhout. Si les amants ont perdu un peu de la bande-son qui couvrait si bien leurs murmures, la musique a par contre gagné en vitalité et en fraîcheur. Une nouvelle étape sans faux pas dans la discographie du jeune pianiste qui ne peut que raviver tout l'intérêt qu'on lui porte. [ Disco ]
Gilbert Isbin / Geert Verbeke : Twins (TERN Records), 1997 & 1998. On sait le guitariste Gilbert Isbin amateur de son étranges obtenus au moyen de guitares acoustiques préparées et son disque précédent, qui en faisait un usage assez radical, aura dû déconcerter plus d'un auditeur. Ce compact, en soi beaucoup plus abordable, n'en continue pas moins l'exploration de paysages sonores inédits. La différence est qu'il le fait ici avec plus de lyrisme, diluant son propos en une forme d'incantation, allant parfois jusqu'à le noyer dans une langueur méditative à l'opposé des combats qu'il se plaît à livrer avec son instrument. Grâce à son alliance avec le percussionniste Geert Verbeke, dont les Berimbau, cloches, amphores et autres gongs renforcent le côté ethnique de la musique, Isbin obtient des sonorités puissantes aux timbres soignés. A la croisée des chemins entre les ambiances ECM de Stephan Micus et celles du guitariste Ralph Towner, Twins apparaît certes beaucoup moins provocateur que Solo Works mais personne ne reprochera au guitariste brugeois d'avoir tempéré son originalité par quelques joliesses. Il donne ainsi l'occasion à une audience élargie de découvrir plus sereinement sa vision. Quand la recherche se pare d'une certaine sagesse, elle n'est pas loin d'aboutir !
Brussels Jazz Orchestra : The September Sessions (WERF 18), 1999. Le grand orchestre de Frank Vaganée est de retour avec ce compact enregistré un mois à peine après sa brillante prestation, illuminée par Kenny Werner, au Jazz Middelheim le 13 août 1999. Six morceaux sur 7, tous fascinants et totalement accessibles, sont écrits par quelques-uns de nos plus brillants compositeurs et arrangeurs : Bert Joris, Frank Vaganée, Michel Herr et Erwin Vann. Quant aux solistes, qu'ajouter de plus : Kurt Van Herck (ts), Frank Vaganée (as), Gino Lattuca (bugle), Laurent Blondiau (tp) et Bart Defoort (ts) ont déjà tous fait leur preuve au fil de leurs propres disques. La Belgique s'était fait remarquer dans le monde du jazz des années 60 par le Kenny Clarke - Francy Bolland Big Band. Voici sa nouvelle arme, affûtée avec pugnacité, compacte comme une cohorte de droïdes, et brillante comme un rasoir. [ The September Sessions ]
Erwin Vann : Worlds (J.A.S.), 1995 - 1998. Lauréat du prix SPES 95, le saxophoniste Erwin Vann abandonne le trio pour un grand ensemble comprenant trois solistes (Vann, Kenny Wheeler au bugle et Pete McCann à la guitare), une section rythmique agrémentée de percussions diverses, un quatuor à cordes, des chœurs et la voix de Norma Winstone. Au carrefour de diverses influences (jazz, world, classique), cette œuvre profonde et majestueuse ressortit davantage à la musique contemporaine d'inspiration européenne et fait la part belle à l'écriture et aux arrangements. Refusant le ressassement, ce projet ambitieux ne se laissera pas dévoiler à l'auditeur pressé à qui l'on conseillera d'écouter en priorité Shiva's Dance dans lequel les trois solistes se livrent à des improvisations débridées sur fond de percussions sautillantes. [ Commander ]
Houben Pirotton Pougin : We Can't Stop Loving You (IGLOO IGL 140), 1998. Finalement revenu de son exode folklorique, Steve Houben (as, fl), qui a emmené son batteur avec lui, s'associe au guitariste Jacques Pirotton pour un album iconoclaste. Leurs versions éclatées de thèmes repris à Gershwin, aux Shadows (le célèbre Apache) ou à Charlie Parker, traversent le ciel serein du jazz belge comme les météorites d'Armaggedon. Sauvage et cultivé, voilà un compact décapant et un retour aussi inattendu que réussi ! [ Commander ]
Pierre Vaiana : Eldorado (IGLOO IGL 067), 1989. Ouvert sur toutes les musiques, le saxophoniste Pierre Vaiana n’aurait pu trouver meilleure idée que de s’associer avec le Trio Bravo pour réaliser cet album dédié à une approche nouvelle des sons et des improvisations. Eldorado, c’est le pays des Incas quelque part entre l’Amazonie et le Pérou, source lointaine et inaccessible où s’évadent les imaginations en quête de mystères et de trésors. Fabrizzio Cassol (saxophones), Michel Massot (tuba et trombone) et Michel Debrulle (batterie), avec leur audace habituelle, ont concocté un véhicule original sur lequel Pierre Vaiana peut s’envoler vers des contrées perdues. Les musiciens soufflent avec leur âme et le vent qu’ils créent les emporte irrémédiablement dans un paysage changeant continuellement de forme et de couleur. Au bout du voyage, c’est bien un Eldorado musical qui les attend.
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