Chronique

The Optimist est le troisième album en trio de Toine Thys. Avec deux différentes de taille par rapport au disque précédent Grizzly (2015). D'une part, ses partenaires ont changé puisque le batteur canadien Karl Jannuska remplace désormais Antoine Pierre derrière les fûts tandis que l'organiste américain Sam Yahel s'est ici substitué à Arno Krijger (toujours présent en concert). D'autre part, le trio est devenu de fait un quartet avec l'ajout du Franco-Sénégalais Hervé Samb aux guitares électriques et acoustiques. Cet équipage multinational s'est rassemblé dans un studio new-yorkais pour enregistrer cet album de proximité aux sonorités chaleureuses.

Est-ce à cause de la présence de Hervé Samb dans le groupe ? Difficile à dire mais Lullaby Of Gounghin affiche des couleurs franchement africaines. La guitare acoustique lancinante y apporte un balancement sahélien alangui sur lequel la clarinette basse du leader peut rebondir pour lâcher des volutes mouvantes qui s'envolent dans le vent du désert. Sur Samuraï au groove brûlant, le versatile Sam Yahel, en véritable gourou du Hammond B-3, démontre que s'il a totalement absorbé la musique de Toine Thys, il lui apporte aussi un supplément de soul avec cette sophistication qui n'appartient qu'à lui (ceux qui ont écouté Momentum du Joshua Redman Elastic Band ou son propre album Truth And Beauty en trio avec Redman et Brian Blade comprendront fort bien de quoi je parle).

Quant à Toine Thys, il confirme son approche éclectique du jazz qui transparaît aussi bien dans son écriture que dans son interprétation. Que ce soit au soprano, au ténor ou à la clarinette basse, il affiche une large palette expressive. Et ses compositions sont toujours très lisibles et contrastées, offrant de vraies mélodies et évitant tous les clichés que ce type de trio avec orgue pourrait laisser imaginer. Bien au contraire, ça joue dans la bonne humeur, ça respire avec aisance, ça se nourrit avec simplicité d'autres cultures et, surtout, ça séduit par l'onctuosité des textures (The Optimist), par une évidente virtuosité dont personne ne fait pourtant étalage (sur les quasi fusionnels Warthog et Bravo), et par l'émotion que certains titres dégagent (Cosmic Wassyl en hommage au chanteur ukrainien Wassyl Slipack mort en juin 2016).

On comprend aisément à l'écoute de ce disque pourquoi il a été intitulé The Optimist : sa musique semble être le reflet naturel d'un artiste ouvert, curieux, joyeux et enthousiaste dont on n'imagine pas une seule seconde que sa vision du monde puisse être atrabilaire. Si vous carburez à l'énergie positive, faites le plein ici !

[ Chronique par P. Dulieu ]