En 2004, le saxophoniste Tom Van Dyck est arrivé avec fracas sur le devant de la scène Jazz européenne avec un étonnant quartet de souffleurs intitulé Saxkartel. Exercice osé et périlleux dont il s’est sorti avec tous les honneurs : son groupe a en effet remporté le concours du Tremplin Jazz d’Avignon en 2006, ce qui leur a permis d’enregistrer en France un second disque dont on peut lire, ailleurs dans ces pages, tout le bien qu’on en pense (Yellow Sounds & Other Colours, De Werf, 2007). Son dernier projet est un septet dénommé t-unit 7 qui comprend quatre souffleurs (deux saxophones, une trompette et un trombone) et une section rythmique (piano acoustique ou électrique, basse électrique et batterie). Le premier titre, Dislectically Divided, requiert instantanément l’attention. Louchant vers le Hard-Bop, ce morceau swingue avec une aisance qui passerait presque pour de la facilité. Après un thème accrocheur écrit par le leader et interprété avec une énergie frontale par les quatre souffleurs, on entre avec bonheur dans la phase d’improvisation : le solo de sax alto de Van Dyck est magistral et il est suivi d’une partie brillante de piano interprétée par Ewout Pierreux, pianiste belge alliant fulgurance et sensibilité, déjà vu et apprécié au côté de la chanteuse sud-africaine Tutu Poane (Song, 2007) et au sein de l’excellent quartet Jazzisfaction (Issues, 2004 et Open Questions, 2005). En finale, la reprise du thème, qu’on a entre-temps plus ou moins mémorisé, confirme les qualités mélodiques du leader qui, contrairement à beaucoup de jeunes jazzmen, ne s’est pas contenté d’aligner bout à bout des séquences d’accords sans âme. Après cette mise en oreilles séduisante, l'intérêt ne faiblit guère : Springwaltz, titre fleuve de près de 12 minutes, est emmené par une rythmique en état de grâce, résultat de l’interaction originale entre le batteur Herman Pardon et le bassiste électrique Mark Haanstra. Les tourneries de cette musique hypnotique montent à la tête et, après une intervention du tromboniste Andreas Schickentanz, on se retrouve soudain au cœur d’une pâte sonore collective pétrie par une basse grondante et hérissée de solos volcaniques. Retour au Hard-Bop classique avec un excellent Pick-up Piece émaillé d’improvisations de haut vol où brillent cette fois la trompette de Michel Paré (Brussels Jazz Orchestra) et le Fender Rhodes d’Ewout Pierreux. Ce sont encore eux qui font la grandeur de The Chase : Paré y est éblouissant tandis que le piano électrique installe par-dessous une trame sonore mouvante comme le pas d’un félin. Quant au saxophoniste ténor Fred Delplancq, il revient sur We'll Get There placer un de ses solos incandescents dont il a le secret tandis que l'esprit note au passage l’usage intelligent de la flûte pour enrichir les harmonies. Un espace est laissé à la fin du disque pour la composition Serendipity de Mark Haanstra qui, avec ses harmoniques de basse, installe une atmosphère insolite. Dans sa diversité qui constitue un bon compromis entre un jazz classique période Hard-Bop Blue Note et un autre plus aventureux et contemporain, ce premier album de t-unit 7 apparaît comme une belle réussite. Nul doute non plus qu’en concert, ce genre de formation, qui allie la vivacité d’un petit combo à la texture d’un big band miniature, n’aura aucun mal à s'imposer.
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