Série III - Volume 9 | Volumes : [ 1 ] [ 2 ] [ 3 ] [ 4 ] [ 5 ] [ 6 ] [ 7 ] [ 8 ] [ 10 ] |
Nemo : Barbares (Quadrifonic), France 2009 | |
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Depuis les classiques d’Ange, de Mona Lisa et d’Atoll, le rock symphonique d’expression française est devenu un genre en soi et il faut avouer que, quand la musique est bonne, le résultat fait particulièrement plaisir à des oreilles francophones. C’est le cas avec ce groupe, fondé au tournant du millénaire par le guitariste et chanteur Jean-Pierre Louveton et le claviériste Guillaume Fontaine, qui a déjà publié cinq albums en studio et un live avant celui-ci. En tout cas, leur dernier opus, Barbares, est une incontestable réussite dont le niveau qualitatif monte encore d’un cran. La musique pourrait être qualifiée de néo-prog marqué aussi bien par la tradition progressive britannique (Genesis et Marillion avec un zeste de prog-métal hérité des années 90) que par un certain romantisme propre à la variété française. Les textes, en français donc, sont globalement sombres et traitent de certains maux inhérents au monde des hommes. Dommage toutefois que la voix de Louveton, qui ne force pas sur l’expressivité mais qui ne peut pas non plus se prévaloir d’un organe très puissant, soit mixée un peu trop en arrière, ce qui limite parfois la compréhension des paroles. Ce petit défaut est toutefois largement compensé par la qualité de la musique qui colle comme un gant aux sujets traités. Variée, aérée, magnifiquement arrangée, elle sonne à la fois moderne et grandiose. Guitares et claviers sont utilisés en conjonction pour créer une multitude d’ambiances et si solos il y a, ils sont parfaitement intégrés à l’ensemble dans une optique d’efficacité avant tout. Il y a même un titre épique de 26 minutes (Barbares) décliné en sept parties, qui constitue en quelque sorte une épreuve de vérité pour un groupe de progressif, et il faut bien avouer que Nemo s’en sort plus qu’honorablement puisqu’à aucun moment, on ne pense à regarder sa montre. Un autre sommet du disque est atteint avec le superbe L’Armée Des Ombres : on y appréciera l’excellente rythmique tout feu tout flammes, l’atmosphère à la fois menaçante et hypnotique, la guitare acide qui lacère la mélodie à tout bout de champ et un refrain aux harmonies bizarres et dont la puissance fantasmagorique est admirablement soutenue par les synthés déchaînés. Seul Le Film De Ma Vie déçoit un peu : trop calibré chanson, ce morceau n’arrive pas à sortir du sentier balisé de la variété et n’aurait probablement pas dû être retenu dans la sélection finale. Sans lui, on quand même encore droit à plus d’une heure de musique progressive passionnante et dotée en plus d’une réelle identité. Recommandé. [ Nemo Website ] [ Barbares (CD & MP3) |
Astra : The Weirding (Rise Above), USA 2009 | |
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Voilà un nom de groupe qui en rappelle un autre et une pochette, plutôt réussie, avec un logo et un dessin qui évoquent la grande époque de Roger Dean. Autant dire qu’on a envie d’aller voir ce que ce groupe originaire de San Diego (Californie) a à offrir dans cet album édité huit années après leur formation en 2001. Dès le premier titre, The Rising Of The Black Sun, on repère les premiers symptômes d’un rock planant et cosmique avec des bulles de synthés et une introduction rubato caractéristique. Mais la guitare lourde et tribale qui vient après évoque davantage les premiers albums de Black Sabbath. Il faut attendre le second titre (The Weirding) pour faire connaissance avec le chanteur dont la voix a un timbre qui n’est pas sans rappeler celui de Ozzy Osbourne. C’est sans surprise qu’on entre ensuite dans un solo de guitare psyché (Brian Ellis) dont le son organique remonte aux prémisses des seventies. Pour étoffer les textures, on a aussi convié à la fête une flûte et un panel d’instruments vintage comme un mellotron, un ARP Odyssey, un Moog et un orgue Hammond. On se croirait piégé dans une faille spatio-temporelle tant l’illusion d’être téléporté au tournant des 60’s / 70’s est forte, l’auditeur n’ayant d’autre alternative que de s’abandonner à une musique hypnotique, définitivement rétro et qui affiche ses racines sans vergogne (les groupes précités mais aussi Eloy, Hawkwind, Barclay James Harvest et, dans une certaine mesure, la première mouture de King Crimson). Edité par le label londonien Rise Above, ce compact offre près de 80 minutes de musique, une durée qui s’explique par les longues parties instrumentales comme on n’hésitait pas en en délivrer autrefois. Le grand reproche que l’on peut faire à Astra est justement de laisser ses compositions ouvertes dériver sans prise dans d’interminables jam sessions, ce qui fonctionne peut-être sur scène mais pas forcément en studio. En fin de compte, on en vient à déplorer cette complaisance d’autant plus que, même si c’est en partie voulu, la production est médiocre, à l’opposé du lustre du nouveau rock symphonique d’un Transatlantic ou des Flower Kings. Peut-être encensé un peu vite à sa sortie par la presse spécialisée, Astra est certes un groupe prometteur mais il lui reste beaucoup d’espace pour s’améliorer. Gardez le cap sur le cœur du soleil les gars, ça viendra ! [ Astra sur MySpace ] [ The Weirding |
Amon Düül : Yeti (Liberty 2LP), Allemagne 1970 – Réédition 1 CD (Repertoire REP 4917), 2001 - Remaster CD (SPV Revisited), 2006 | |
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![]() [ Yeti |
Amon Düül : Wolf City (United Artists Records), Allemagne 1972 – Réédition CD (Repertoire), 2002 – CD remastérisé (SPV Revisited), 2007 | |
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![]() [ Wolf City + 3 bonus tracks [CD SPV] |
Amon Düül : Tanz Der Lemminge (United Artists Records), Allemagne 1971 – Réédition CD (Repertoire REP 4915), 2001 – CD remastérisé (SPV Revisited), 2006 | |
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![]() [ Tanz Der Lemminge (CD SPV Revisited) |
Happy The Man : The Muse Awakens (InsideOut), USA 2004 | |
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Cristallisé au début des années 70 autour du claviériste Kit Watkins, du saxophoniste Frank Wyatt, du bassiste Rick Kennell et du guitariste Stanley Whitaker, Happy The Man n’a jamais vraiment rencontré un succès commercial équivalent aux groupes auxquels on le compare parfois comme Jan Hammer pour le côté fusion mélodique à base de Minimoog ou Gentle Giant pour la complexité des compositions. A l’instar de ces derniers, ils jouent un rock ambitieux, très écrit et à forte dominante instrumentale qui les fera connaître des initiés sans toutefois leur donner les moyens de survivre, ce qui entraînera une dissolution forcée en 1979. Leurs deux premiers opus Happy The Man (Arista, 1977) et Crafty Hands (Arista, 1978), réédités chez Musea, restent certainement deux disques à redécouvrir. De manière inopinée, Happy The Man réapparaît en 2000 à l'occasion du festival américain de rock progressif NEARfest et, dans la foulée, produit un nouvel album intitulé The Muse Awakens. A part Kit Watkins dont on a perdu la trace depuis son passage chez Camel en 1979 (on peut l’écouter sur l’album I Can See Your House From Here auquel il a légué une unique composition dénommée Eye Of The Storm), les autres membres fondateurs sont au rendez-vous si bien que la musique est fidèle à l’esprit du groupe original. Essentiellement instrumental (Stanley Whitaker chante uniquement sur Shadowlites), The Muse Awakens offre une combinaison de fusion light avec un rock progressif symphonique très mélodique. Quelques titres sont plutôt réussis comme Contemporary Insanity, concis et tendu avec de beaux interplays intrumentaux, l’étrange Stepping Through Time qui est pourvu d’une belle mélodie dépaysante ou Il Quinto Mare, une mini-symphonie joliment orchestrée. Dans l’ensemble, l’album manque toutefois d’envergure et, surtout, d’une ou deux compositions mémorables pour s’imposer vraiment dans l’abondante production de l’année 2004. Une fois de plus, ce groupe malchanceux qui faillit jadis s’associer avec Peter Gabriel après son départ de Genesis, quittera la scène sans remous même si quelques uns de ses membres ont continué par la suite à jouer du rock progressif dans le même style sous le nom d’Oblivion Sun. [ Happy The Man ] [ The Muse Awakens |
Happy The Man : Crafty Hands (Arista), USA 1978 – Réédition CD (Musea), 2007 | |
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Crafty Hands est le second album de Happy The Man et on peut le considérer comme leur opus majeur. Ce qui a probablement fait la réputation de ces Américains basés à Washington D.C. est que leur musique était très originale et difficilement catégorisable même si l'on y décèle des références à une fusion light et à l’approche progressive de groupes comme Gentle Giant, Genesis et Alan Parsons Project. Combinant rock symphonique spatial avec une complexité au niveau des compositions, le groupe se montre particulièrement à l’aise dans les instrumentaux qui constituent d’ailleurs l’essentiel du répertoire (seul Wind Up Doll Day Wind est chanté par le guitariste Stanley Whitaker qui n’arrive guère à convaincre). Les thèmes sont soigneusement structurés et laissent peu de place aux improvisations mais ce qui frappe surtout est un aspect cinématique lié à l’étrangeté des arrangements où les divers instruments s’entrelacent dans des contrepoints complexes. Le producteur du premier album, Ken Scott (Mahavishnu Orchestra, Supertramp), qui fut retenu aux commandes, aida grandement les musiciens à sortir le meilleur d’eux-mêmes grâce à un travail de perfectionniste. Kit Watkins en particulier affiche une maîtrise des claviers qu’il joue avec grâce tandis que ses composition Morning Sun et The Moon, I Sing sont aussi belles et délicates qu’un papillon multicolore en plein vol. Le nouveau batteur, Ron Riddle (qui jouera dans les 80's avec Blue Oyster Cult) contribua à l’écriture de Service With A Smile qui ouvre l’album de bien belle façon : ce titre superbe est devenu culte en France après qu’il fut choisi, dans les années 80, comme indicatif de l’émission WRTL-Live présentée chaque samedi soir par Dominique Faran. A noter aussi le surprenant et humoristique Ibby It Is de Frank Wyatt, censé décrire un personnage de dessin animé désirant passer dans le monde réel (un thème qui aurait convenu comme un gant à Frank Zappa). Crafty Hands n’eut guère de succès commercial en dehors d’un cercle fermé d’initiés, ce qui entraîna le désintérêt du label Arista qui finit par éjecter le groupe de son écurie. Cette décision fut fatale à Happy The Man qui se désintégra peu de temps après. Il n’empêche que cet album reste une des réalisations parmi les plus habiles et subtiles que le rock progressif américain ait produit dans les glorieuses seventies. [ Happy The Man ] [ The Muse Awakens |
Camel : Harbour Of Tears (Camel Productions), UK 1996 | |
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Des disques qui reprennent les recettes symphoniques du Dark Side Of The Moon ou de Wish You Were Here du Pink Floyd, il en existe des piles et rares sont ceux qui valent les originaux. Mais Camel n’est pas n’importe qui et son guitariste chanteur Andy Latimer est un musicien complet (il joue aussi de la flûte et des claviers sur cet album) avec des idées qui donnent naissance à de vrais albums conceptuels. Harbour Of Tears (le port des larmes), c’est Cobh, au sud de l’Irlande, point de départ de plus de deux millions et demi d’Irlandais (parmi lesquels figuraient vraisemblablement les ancêtres de Latimer) qui, par suite des famines de 1948 à 1950, émigrèrent pour une bonne part en Amérique du Nord. Ceci explique qu’on entend sur ce disque des influences celtiques, dont le chant immaculé de Mae McKenna qui ouvre le répertoire (Irish Air) en rappelant quelque peu la bande sonore de Titanic (après tout, c’est bien à partir de Cobh que le Titanic entama sa fatale traversée de l’Atlantique). Compte tenu de la charge dramatique des évènements abordés, on aurait pu s’attendre à une musique nostalgique, monotone, voire morose mais l’écueil est évité. Si quelques titres traduisent bien la mélancolie qu’on dû ressentir les immigrants au moment de fuir leur pays, d’autres sont plus enjoués et certains ont même ce groove floydien si particulier, propice aux grandes envolées de guitares qui donnent le frisson. Les arrangements orchestraux sont superbes sans être techniquement compliqués : les cordes en particulier, qui sont utilisées avec parcimonie, apportent de la profondeur aux textures. Les paroles insistent sur l’attachement des hommes à l’Irlande et à leurs familles, les souvenirs qu’ils préservent quand la côte a disparu dans la brume (My eyes are now tired and no longer see. But visions of Ireland linger in me) et, une fois arrivés sur la terre promise, le dur labeur dont le prix sera en partie renvoyé au pays (It took six months from the Cobh, another six by land, but the pay is good, and as I should, I'll send home the slates). L’album se referme sur un instrumental dédié au père de Latimer décédé l’année précédent cet enregistrement. Le chant irlandais du début est ensuite brièvement repris avant que la plage ne s’étende avec le bruit des vagues qui se répercutent à l’infini dans une sorte de respectueux silence. Ce disque appartient à l’excellente trilogie symphonique, planante et émotionnelle que composa Camel dans les années 90 et qui comprend aussi Dust And Dreams (1991) et Rajaz (1999). Maintenant, si cet album évoque à certains David Gilmour et le Pink Floyd de la grande époque, que ça ne les empêche surtout pas d’écouter cette superbe musique. [ Harbour of Tears |
Camel : Rajaz (Camel Productions), UK 1999 | |
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Après un Dust And Dreams (1991) impérial basé sur le roman « Les Raisins de la Colère » de John Steinbeck et un Harbour Of Tears (1996) aux accents celtiques, Camel referme sa trilogie des années 90 avec un troisième album inspiré cette fois d’une forme de poésie arabe dénommée « rajaz » que les caravaniers récitent comme une litanie pour oublier la fatigue du voyage. Affinant en quelque sorte l’approche symphonique, planante et émotionnelle des deux disques précédents, Andy Latimer et son groupe, plus soudé que jamais après une tournée live, délivre un nouveau projet qui, cette fois, n’est pas un album conceptuel même si les thèmes tournent autour du désert et si les improvisations sont parfois imprégnées de mélopées arabisantes. Rajaz marque aussi le retour de Ton Scherpenzeel aux claviers. A cause de sa phobie des avions, le Hollandais membre fondateur de Kayak, qui jouait sur Stationary Traveller et Dust and Dreams, n’a toutefois pas rejoint physiquement le groupe aux Etats-Unis mais n’en contribue pas moins à quelques beaux interplays avec le leader (écoutez par exemple Lost And Found marqué par son style caractéristique). Peut-être à cause de cette collaboration à distance forcément limitée, Rajazz apparaît surtout comme un disque de guitariste : des guitares, il y en partout et avec des sons très différents obtenus en changeant d’instruments, d’amplis et de pédales d’effets. Three Wishes pose tout de suite les bases de cette musique : l’introduction qui va en crescendo est du Pink Floyd tout craché tandis que Latimer se paie un solo gilmourien sur un rythmique en 5/8 qui ajoute du piment à cette musique qui se transforme peu à peu en un thème original et mémorable. Le reste du répertoire est à l’avenant avec des pics qui comptent parmi les plus belles réussites de Camel, premiers albums inclus. Lawrence par exemple est un morceau épique magnifiquement arrangé et marqué une fois encore par l’art de Scherpenzeel en matière d’orchestration tandis que Latimer parvient à rendre l’atmosphère du désert dans ses somptueuses improvisations de guitare. Quant au chant du leader, souvent considéré comme le maillon faible du groupe, il faut avouer que sa manière de chanter ici, sans forcer sa voix, convient plutôt bien à ce type de musique intimiste. L’un dans l’autre, Rajaz clôture en beauté les années 90 en permettant au groupe de retrouver ses racines : la mélodie, l’émotion et, surtout, le balancement nonchalant de l’animal dont il a emprunté le nom. [ Rajaz |
Sloche : J'un Œil (LP RCA Records), Canada 1975 – réédition CD (ProgQuébec MPM35), 2009 | |
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Ce groupe québécois des années 70 joue une musique très personnelle et essentiellement instrumentale parfois classée dans le genre fusion en dépit de son éclectisme. C'Pas Fin Du Monde qui débute cet album en donne une bonne idée : l’introduction ressemble à une musique space genre Ozric Tentacles avant que la rythmique ne déboule en imposant un groove infectieux sur lequel les solistes s’en donnent à cœur joie, groove bientôt interrompu par un break donnant accès à un environnement étrange et menaçant, genre Univers Zero, avant d’évoluer à nouveau vers une fusion débridée propice à de nouveaux solos de claviers (le quintet comprend deux claviéristes). La petite section comprenant des vocalises est également superbe et fait regretter que le groupe ne développe pas davantage cet aspect de sa musique. Le Kareme D'Eros débute par un piano solo classicisant qui, après un break vocal anarchique, conduit a de beaux échanges entre synthés et guitares. A cause de son chant en français, le titre éponyme, J'un Œil, évoque brièvement des groupes de rock symphonique comme Ange ou Martin Circus mais la musique ici est définitivement plus complexe. L’instrumental Algébrique, qui porte bien son nom, ressemble par contre aux compositions mathématiques et tortueuses de Gentle Giant et c’est l’un des grands moments de l’album. Quant au Potage Aux Herbes Douteuses qui referme le répertoire, c’est le morceau le plus jazz-rock de l’album avec des passages carrément funky mais qui comprend aussi une section plus symphonique dominée par un orgue et des vocalises. Ce groupe, qui n'a produit que deux disques (Stadaconé édité l’année suivante est plus dans le genre jazz-rock), a réalisé une étonnante fusion de styles divers avec une époustouflante musicalité qui en rend l’écoute jubilatoire. Cette aventure musicale était d’ailleurs tellement en avance sur son temps qu’elle apparaît encore aujourd’hui fraîche et innovante. Le LP a été réédité en 2009 sur le label canadien ProgQuébec au côté d’un autre groupe québécois similaire appelé Maneige. [ J'un Œil |
Maneige : Les Porches (LP Harvest ST-6438), Canada 1975 – Réédition CD (ProgQuebec MPM25), 2007 | |
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![]() A noter qu’il existe une version live de « Les Porches », enregistrée peu de temps avant la sortie de l'album officiel, qui est désormais également éditée en CD par ProgQuebec. Certes, les morceaux souffrent d’un manque de moyens et ne valent pas les versions en studio : la partie chantée sur Les Porches de Notre Dame a, par exemple, été purement supprimée par suite de l’absence du chanteur invité Raoul Duguay et, globalement, les textures sont moins riches. Mais, malgré tout, ce concert témoigne de la bonne tenue d’un groupe au talent singulier. A tel point qu’on se demande comment Maneige a pu passer aussi longtemps entre les mailles des filets des innombrables historiens du rock progressiste. [ Les Porches |
Kleptomania : Elephants Lost (LP Flame), Belgique 1971 (édition 1979) – réédition 2 LP (Amber Soundroom ASLP 032/033), 2006 | |
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![]() ![]() [ Elephants Lost |
Waterloo : First Battle (Vogue), Belgique 1970 – Réédition CD (Musea), 1999 | |
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![]() [ First Battle |
Art Bears : Winter Songs (Re Records Re 0618), UK 1979 – Réédition CD (Recommended Records ReR AB2) 2003 | |
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Il n’est pas si difficile d’entrer dans la musique bizarre de ce trio réputé pour être un des fers de lance du mouvement « Rock In Opposition ». Henry Cow semble désormais une affaire close au moment où paraît ce deuxième opus d’Art Bears. Par rapport à leur ancien groupe, les trois musiciens se sont concentrés sur une approche plus vocale mais aussi plus moderne, quoique toujours avant-gardiste, et qui intègre des références « ambient » et folkloriques sans parler des effets de studio intelligemment triturés par l’ingénieur Etienne Conod, également responsable des mixages savants de ces bandes sonores ténébreuses que sont « Heresie » et « Ceux du Dehors ». Composée sur le tas et enregistrée en Suisse en deux semaines, l’œuvre dégage une plus grande cohérence que les deux autres albums du trio, d’autant plus que les textes du batteur Chris Cutler sont tous inspirés de sculptures médiévales ornant les bas-reliefs des grandes cathédrales dont celles d’Amiens et de Nantes. Bien qu’il ne s’agisse que d’une simple description narrative des scènes illustrées dans la pierre (He steps from a crucible held by an angel. The angel is poised to hurl a stone toward him the boy. All is encompassed in the night when twelve stars shine), leur poésie ésotérique est bien réelle et contribue à rendre énigmatiques ces petites miniatures dont la durée moyenne tourne autour de trois minutes. La voix de Dagmar Krause, inspirée par le style cabaret des années 20 et l’œuvre de Kurt Weill, est immédiatement reconnaissable tandis que Fred Frith joue de tous les instruments (guitares, violon et claviers) en dehors de la batterie et des percussions et s’impose comme un coloriste habile à installer des atmosphères les plus diverses. Centré davantage sur les prouesses vocales de la chanteuse, Winter Songs est un album à part dans le genre RIO. La musique austère et chaotique reflète le mysticisme des scènes décrites mais, connaissant le caractère contestataire de ces artistes engagés, elle va probablement au-delà en suggérant par une série de métaphores une comparaison entre les disparités sociales du monde féodal et celles engendrées par le capitalisme moderne. En fin de compte, ces chansons d'hiver constituent une œuvre forte, intrigante et unique sur laquelle aucun amateur de musiques progressistes ne saurait faire l’impasse. [ Winter Songs |
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