L'Interview de Philippe Moulin
Pierre: Bonjour Philippe. A ce stade ce n'est plus la peine de faire les présentations puisqu'elles ont déjà été faites dans une autre interview parue dans ce magazine et consacrée à ton second livre sorti récemment : Les Maîtres de la Fusion Jazz Funk, Jazz Rock. Passons donc plutôt à la première question. Commencer une histoire du rock en 1965, année charnière du rock moderne marquée par la parution, entre autres, de Highway 61 Revisited et de Rubber Soul, paraît logique. Mais pourquoi s'arrêter en 1979 à l'aube d'une nouvelle révolution musicale engendrée par les inventions technologiques ?
Philippe: Bonjour Pierre, c'est un plaisir de réaliser avec toi ce nouvel interview autour de mon premier livre axé sur le Rock. Il est essentiel en effet que les deux intervenants maîtrisent le sujet ; ce ne fut pas toujours le cas par le passé.
Pour répondre à ta question, au fil des années 1980, les productions et les arrangements, dans leur grande majorité, se ressemblent et se radicalisent hélas en une formule simpliste et volontairement commerciale. Le Rock-F.M. envahit les radios. Un formatage excessif du son rend insipide la plupart des produits culturels de l'industrie musicale rock. Le compact-disc fait son apparition (tout nouveau tout beau), mais si le son gagne en dynamique et en brillance, il a en revanche beaucoup perdu en naturel et en chaleur. En outre, les albums manquent trop souvent d'inspiration et de profondeur, ce qui ne les empêche nullement de sortir à profusion. La majorité des artistes ne contrôlent plus ou ne veulent plus contrôler ni leur musique, ni leurs projets qui appartiennent, pour la plupart, aux producteurs, aux maisons de disques et aux multimédias grandissants. Une nouvelle génération de groupes apparaît, leur musique s'orientant à fond vers le lucratif marché du hard rock et du heavy métal. En parallèle, des claviers synthétiques assiègent également le classic rock, en devenant les nouveaux maîtres de cérémonie. Pour beaucoup, même si la créativité artistique est moindre, le succès commercial décolle et incite les maisons de disques et beaucoup de musiciens à continuer dans cette voie toute tracée !
Dans les années 1990, très peu de « nouveaux artistes » pop-rock me séduiront vraiment sur la durée. On peut heureusement citer Radiohead, Beck, Lenny Kravitz, Ben Harper, Nirvana, Fiona Apple, Beth Orton et, bien sûr, la comète Jeff Buckley, un artiste d'exception, à la vie bien trop éphémère, comme ce fut également le cas pour son père. Son album Grace (1994) sera et demeure le chef-d'œuvre absolu à mon sens de cette décennie. Les espoirs déçus seront également nombreux. A titre d'exemple, le clin d'œil charmeur et subtil du premier album du groupe The La's (1990) sera sans suite. L'orientation trip-hop verra émerger des groupes comme Massive Attack ou Portishead. Le mouvement dit "Jam-Band" apparu dès le milieu des années 80 va se définir comme un genre à part entière, permettant à d'excellents musiciens, parfois virtuoses, mais n'ayant pas toujours la plume très originale ou créative, de revisiter avec passion, talent et quelquefois beaucoup de grâce, un large éventail de styles, comme le blues-rock, le country-folk, la musique psychédélique, le rock progressif, le funk-rock, le jazz-fusion, le hard-blues, et j'en passe.
Une mouvance culturelle s'est construite autour de cet amour et de ce retour aux racines, pouvant inclure au passage des sonorités nouvelles comme la musique électro. Cette scène de musiciens aux influences variées a tenté, avec plus ou moins de réussite (artistique ou commerciale) de faire revivre l'esprit de liberté et la richesse de l'expression musicale, chers aux années soixante et soixante-dix. Ce marché parallèle sortait du format imposé par les principales maisons de disques (les majors) et, par la même occasion, laissait libre cours à l'improvisation musicale. Enfin, les grands artistes en place vieillissaient et la relève s'avéra un peu juste. Certes, U2, Prince, Sting, les Stray Cats, Stevie Ray Vaughan et quelques autres, comme le jeune Beck, sauront maintenir ou développer un niveau musical comparable à celui de leurs aînés. Certains amateurs de rock, issus de cette nouvelle génération d'artistes préfèrent à l'évidence ces deux décennies aux deux précédentes développées dans mon ouvrage qui, je le rappelle, n'a pas pour vocation d'être une encyclopédie, mais plutôt une anthologie subjective du rock à une période bien précise.
Pierre: Ecrire un livre sur l'histoire du rock, c'est évidemment, si l'on considère la pléthore de disques qui sortent chaque année, faire des choix. Comment as-tu sélectionné les disques proposés pour chaque année : sur la base de leurs ventes ? De leur importance artistique selon des critères objectifs ? De l'émotion subjective qu'ils t'ont procurée ? De leur réputation chez certains exégètes du rock ?
Philippe: Je crois que tu connais déjà la réponse, Pierre. L'importance artistique a toujours été pour moi l'élément primordial. Mes chroniques parlent essentiellement de musique, au sens propre du terme. J'essaie d'être le plus objectif possible, au risque de ne pas faire plaisir aux inconditionnels de tous bords. L'émotion est certes subjective selon chaque personne. En ce sens, dans le domaine de l'art et plus précisément ici dans celui de la Musique, le vécu, les diverses expériences, la curiosité, le plaisir d'écoute, la connaissance, la comparaison et l'analyse sont autant d'éléments qui affinent et définissent notre perception et notre émotion et, finalement, nos goûts. De ce fait, il est plus aisé ensuite de se faire sa propre opinion en restant le plus possible impartial.
Pierre: Il existe plusieurs livres disponibles en français sur le même sujet. Peux-tu nous dire ce qui donne à celui-ci sa spécificité ?
Philippe: J'ai voulu réaliser un ouvrage sans concession, s'adressant autant aux néophytes qu'aux passionnés de musique rock au sens large du terme, tout en étant très sélectif sur le choix des albums sélectionnés et chroniqués et sur les années abordées, contrairement à la majorité des livres sur le sujet. De surcroît, la langue de bois ne faisant pas partie de ma personnalité, je prenais le risque assumé de ne pas plaire à tout le monde, mettant en exergue mes préférences. Je voulais également un beau livre, grand format, tout en couleur avec un papier de qualité, de belles photos d'artistes, agréable à lire de par sa présentation chaleureuse et sa mise en page très précise. Tout cela a un coût et beaucoup d'éditeurs n'ont pas eu le courage de me suivre dans cette démarche anti-commerciale, mais qui s'est avérée bénéfique au fil du temps et judicieux à en juger par mes nombreux lecteurs qui ne cessent de me féliciter pour avoir écrit un ouvrage « pas comme les autres ». Je remercie au passage Didier Carpentier, l'éditeur de ce livre qui a bien voulu accepter une grande partie de mes exigences. Le bouclage a été réalisé dans l'urgence pour que le livre sorte avant les fêtes de Noël 2012. De ce fait, la relecture à été rapide et quelques coquilles ont survécu ! Rien n'est parfait en ce monde, mais lorsque je compare mon ouvrage aux autres traitant du même sujet, je suis assez satisfait du résultat…
Pierre: Je constate que tu t'es globalement plus intéressé au contenu qu'au contenant, à savoir davantage à la musique plutôt qu'aux pochettes. C'est normal, mais certaines pochettes des disques qui sont de vraies œuvres d'art n'ont-elles jamais exercé un attrait particulier sur toi (avant même d'écouter la musique) ?
Philippe: Si la musique a toujours été pour moi plus importante que les pochettes de disques, j'ai bien sûr été très sensible et admiratif face aux magnifiques pochettes vinyles des années 60 et 70. A cette période j'achetais beaucoup de vinyles, mais jamais pour leurs pochettes, il me fallait écouter ce qu'elles renfermaient. Mais quel bonheur lorsqu'un grand disque bénéficie en outre de magnifiques illustrations de couverture comme celles, à titre d'exemples, des Beatles, des Who, de Santana, Yes, Jethro Tull, Led Zeppelin ou Frank Zappa. Une très belle couverture d'album n'a jamais influencé mon analyse sur la musique qu'elle renfermait. En revanche, il est regrettable que certaines personnes soient passées à côté de chefs-d'œuvre musicaux simplement à cause d'une illustration de couverture qu'ils ont jugé ratée (à tort ou à raison). J'ai vécu quelques expériences dans ce domaine lorsque j'étais disquaire.
Pierre: Pour le fun, pourrais-tu nous citer quelques exemples de très bons albums de rock avec des pochettes complètement ratées ?
Philippe: Avec plaisir car, au regard de certains, ils méritent une seconde chance, même si, comme on dit, les goûts et les couleurs...
- Pet Sounds des Beach Boys (les bruits de la ferme, gaz naturels compris, n'étaient pas encore tendance);
- Watt de Ten Years After (la pochette vinyle avant-première était pourtant parfaite !);
- Second Helping de Lynyrd Skynyrd (sans commentaire…);
- Phosphorescent Rat de Hot Tuna (sans commentaire…);
- Double Dose de Hot Tuna (le recto de ce double album live de légende est affligeant).
Pierre: Certains disques souvent jugés comme essentiels ne se retrouvent pas dans tes sélections annuelles. Je pense par exemple à Freak Out des Mothers Of Invention, Disraeli Gears de Cream ou White Light White Heat du Velvet Underground. Connaissant ta vaste culture et ton éclectisme, j'imagine qu'ils ont été volontairement omis. Pour quelle raison ?
Philippe: Pour Freak Out des Mother Of Invention, il méritait amplement de figurer dans le livre, mais j'ai toujours eu du mal à l'écouter en entier, le délire vocal en est la principale raison et le chroniquer dans le contexte de l'époque m'embarrassait particulièrement. En ce qui concerne Disraeli Gears (1967) c'est un oubli regrettable, je l'avoue. J'ai toujours préféré écouter le groupe en live et je n'avais jamais acheté le disque. C'est assurément leur plus grande réussite enregistrée en studio ; je trouve que la production artistique de l'ensemble a bien traversé les décennies sans prendre une ride par rapport à leurs autres albums. Par ailleurs, je n'ai jamais été très partisan du Velvet Underground et de leur sonorité « garage » et « punk rock » avant l'heure. La discographie et le répertoire de Lou Reed développés après le Velvet Underground (ayant largement intégré les morceaux du Velvet) m'ont davantage convaincu.
Pierre: Les disques de soul qui ont contribué largement à l'histoire musicale de cette période ne sont pas très représentés. Je pense par exemple à River Deep Mountain High d'Ike et Tina Turner, Otis Blue d'Otis Redding, Lady Soul d'Aretha Franklin ou Stand de Sly & The Family Stone. Considères-tu qu'il s'agît d'un style, comme le blues, à traiter à part du "Rock" ? Et dans ce cas, quelle serait ta définition du rock qui semble en revanche bien inclure le folk, le reggae, le jazz-rock, le blues-rock et le country-rock ?
Philippe: J'ai hésité à inclure des artistes incontournables qui figurent dans ma discothèque personnelle depuis des décennies comme James Brown, Ike & Tina Turner, Otis Redding, Aretha Franklin, Sly & The Family Stone, Stevie Wonder et quelques autres comme le Funkadelic ou Eric Burdon & War pour deux raisons fondamentales. La première, parce-que le rock n'était pas vraiment la dominante musicale et/ou l'esprit initial de leur style respectif, même si, par exemple, la sonorité très appuyée et psychédélique du Funkadelic attirait forcément beaucoup d'amateurs de rock. Ces genres et styles de musique méritent à eux seul un grand ouvrage à part. La seconde raison est d'ordre plus technique, laquelle m'a contraint hélas à ne pas dépasser le nombre de pages maximum souhaité par l'éditeur. De ce fait, j'ai dû faire l'impasse sur des artistes purement rock que j'apprécie beaucoup, mais moins essentiels, comme Frank Marino & the Mahogany Rush ou le méconnu Pat Travers. J'aurai dû retirer trois ou quatre chroniques d'artistes comme certaines de Ry Cooder et Taj Mahal, largement présents dans le livre : cela m'aurait permis d'inclure, entre autres, Frank Marino, Pat Travers ou encore Rush et Scorpions et d'éviter ainsi quelques reproches de fans inconditionnels. En ce qui concerne le blues, le blues-rock, le folk, le reggae, le country-rock, le jazz-rock, toutes ces formes de musiques se sont naturellement apparentées à un moment ou à un autre à la musique rock. A partir des années 60, les magasins de disques, petits ou grands, ont dû compartimenter la musique par genre. Le blues d'un côté, le rock de l'autre, le blues-rock se rangeait dans le rock, tout comme le folk, le reggae était rangé à part, tout comme la musique soul-funk. Un seul livre sur le rock ne peut contenir toutes ces variantes. Au fil des décennies, la musique a fusionné sans cesse avec notamment la musique du monde et les nouvelles technologies. Un classement par genres et par styles est indispensable, mais est devenu de plus en plus difficile à effectuer et parfois sujet à la controverse.
Pierre: En ce qui me concerne, Taj Mahal et Ry Cooder méritaient bien une place de choix dans le livre. En revanche, tu as été honnête en accordant la place nécessaire aux grands groupes punk. Pourtant, te connaissant, j'imagine que ça n'a pas été la partie du livre la plus agréable à écrire. Que penses-tu réellement (et sans langue de bois) des Sex Pistols, Ramones et autres Damned dont les albums sont souvent inclus dans les listes des meilleurs disques de rock, toutes époques confondues ?
Philippe: Certains ont découvert le rock avec les Sex Pistols et les Damned entre autres, alors forcément cela change la donne et leur perception du rock dans son ensemble. Ils leurs est sans doute difficile d'apprécier des groupes comme Steely Dan ou Yes et réciproquement. Les Sex Pistols se sont définis eux même : « La plus grande escroquerie du rock'n'roll ! » et ce n'est certainement pas moi qui vais dire le contraire. Je pense avoir été clair dans mon ouvrage. Bien que particulièrement extraverti, la rock'n'roll attitude, tout comme la punk attitude n'ont jamais fait partie de ma panoplie vestimentaire et comportementale. Les grands gagnants dans l'histoire sont, entre autres, les journalistes de la presse musicale française dite « spécialisée », profitant de la censure radio et de l'interdiction de vendre singles et albums du groupe sur le sol britannique permettant à la France (dite plus libérale à cette époque) de récupérer à fond le mouvement punk et tout son folklore. Certains disquaires ont joué le jeu - à chacun sa soupe, tout est bon pour vendre de la galette même si elle n'est pas royale ! Mes chroniques sur les New York Dolls, les Sex Pistols et les Ramones ont dû agacer et irriter certains de mes lecteurs. D'autres ont adoré ! Pour les disques des Damned, j'ai toujours eu la chance, lorsque je vivais en appartement mal insonorisé, qu'aucun de mes voisins n'en possède…
Pierre: Malgré tout, en dépit de leur musique simpliste et caricaturale et de leur démarche intransigeante, ne penses-tu pas que le mouvement punk a quand même débarrassé le rock d'un côté prétentieux, pompeux et mercantile qui commençait à devenir une peu trop proéminent chez certains ? Après tout, sans le punk, The Clash ou Motörhead n'auraient pas vu le jour tandis que David Bowie, Peter Hammill, Peter Gabriel et peut-être même Robert Fripp n'auraient peut-être pas changé si radicalement leur approche musicale à l'aube des années 80 ? Qu'en penses-tu ?
Philippe: Sur le fond je suis d'accord, mais pas sur la forme, car développer une vulgarité à outrance sans pour certains savoir jouer d'un instrument n'était pas revenir aux sources du rock'n'roll ou du rock. The Clash est à mon sens le seul groupe issu du mouvement punk qui a su, à tous les niveaux, revendiquer avec talent ce nouveau mouvement culturel. Je pense que le groupe Motörhead aurai vu le jour même si le punk n'avait pas explosé en 1977. Il y a toujours eu par le passé des groupes de hard rock comme le MC5 ou les Stooges qui jouaient du punk rock avant l'heure. Bowie a toujours été un caméléon du rock, il ne s'est jamais laissé enfermer longtemps dans un style. Le mouvement punk l'a certes influencé, mais pas plus que d'autres formes de musique. Il en va de même pour Peter Hammil, Peter Gabriel ou Rober Fripp, des musiciens avérés ; leurs racines musicales, profondément ancrées dans la musique rock progressive n'a jamais disparu malgré l'arrivée du punk. La plupart des artistes en place doivent à un moment ou à un autre tenir compte des modes et des tendances véhiculées par les médias, les producteurs et la concurrence. Dans le même temps, ils doivent éviter de perdre leur propre identité. La musique rock survivra tant qu'il y aura des artistes authentiques, créatifs, qui ne misent pas tout sur le paraître et la provocation.
Pierre: As-tu prévu d'écrire un second volume des « Authentiques Trésors du Rock » pour la période 1980 à aujourd'hui ou bien, considérant l'éclatement et la multiplicité des genres dont beaucoup s'avèrent moins intéressants pour les vrais mélomanes, considères-tu que c'est mission impossible ?
Philippe: : Si ma santé et le temps me le permettent, j'écrirai la suite des Authentiques Trésors du Rock en parlant uniquement des albums qui m'ont marqué de 1980 à nos jours. Une sélection très stricte donc. Avant cela, il me faut écrire la suite des « Maîtres de la Fusion Jazz », un travail vraiment énorme !
Pierre: Au plan musical, quelle "Lady Du Rock" t'a le plus marqué ? Et pourquoi ?
Philippe:Sur le plan musical, la "Lady du Rock" qui m'a le plus marqué se situe entre le Folk, le Rock et le Jazz ; certains ont certainement deviné que je parle de Joni Mitchell, musicienne accomplie, multi-instrumentiste, chanteuse, auteure, compositrice ayant notamment composé l'illustre morceau éponyme du film on ne peut plus culte "Woodstock" magistralement repris par Crosby, Stills, Nash & Young.
Cette muse charmante au mille talents n'est pas une "Lady du Rock" au sens propre du terme, comme les sex-appeals Blondie ou Pat Benatar, bien qu'elle ait influencé de grands noms du Rock. De surcroît, son aura et plus précisément son impressionnant parcours musical comprenant, entre autres, ses propres albums et compositions comme les précieux "Court and Spark" (1974), "The Hissing of Summer Laws" (1975) et "Hejira" (1976) ajoutés à ses relations très personnelles avec de grandes stars du rock et du folk-rock furent par moments très rock'n'roll !
Pierre: Si tu ne pouvais emporter comme souvenir que dix albums physiques de rock sur Mars, lesquels choisirais-tu ?
Philippe:1. Dark Side Of The Moon de Pink Floyd; 2. Who's Next des Who; 3. Electric Ladyland de Jimi Hendrix; 4. Sergent Pepper's… des Beatles; 5. Close To The Edge de Yes; 6. Blow By Blow de Jeff Beck; 7. Let It Bleed des Rolling Stones; 8. Crosby, Stills & Nash de Crosby, Stills & Nash; 9. Caravanseraï de Santana et 10. Okie de J.J. Cale.
Pierre: Une autre question amusante et un peu similaire est celle-ci : quels sont selon toi les meilleurs premiers albums (début albums) de l'histoire du rock, ceux qui ont installé leurs auteurs directement au panthéon des groupes les plus célèbres ?
Philippe:Are You Expérience (1967) de Jimi Hendrix - The Doors (1967) des Doors - Steppenwolf (1968) par Steppenwolf - Crosby, Stills & Nash (1969) par Crosby Stills & Nash - Led Zeppelin (1969) par Led Zeppelin - In The Court Of The Crimson King (1969) de King Crimson - Chicago Transit Authority (1969) de Chicago - Santana (1969) de Santana - Naturally (1971) de J.J Cale - America (1971) de America - Can't Buy A Thrill (1972) de Stelly Dan - Van Halen (1978) de Van Halen et Grace (1994) de Jeff Buckley.
Pierre: Quel est ton tout premier "souvenir rock", disque, concert, autre ?
Philippe:Mon premier "souvenir rock" fut le jour où j'ai eu la chance d'assister à mon tout premier concert et pas des moindres : Les Who passaient à Paris, au théâtre des Champs-Elysées. Parisien de naissance, j'avais alors quatorze ans et des brouettes, accompagné sur les lieux par ma mère qui ne voulait absolument pas que je m'y rende seul et qui assista également au concert. Le choc fut immence, je fus bouleversé comme jamais auparavant, tant par la musique jouée par le quatuor anglais que par le spectacle visuel hallucinant qu'il développait sur scène. Ma vie à partir de ce jour-là se trouva chamboulé à jamais. Je prenais dès lors les membres du groupe pour des Dieux !
Pierre: Quel est ton dernier disque de rock acheté ?
Philippe:Difficile à dire avec certitude, mais je crois que c'est l'album "Rival Sons" (2019) du groupe Feral Roots, si l'on exclut les achats de disques de Jazz Rock.
Pierre: L'opposition entre les deux grands groupes anglais des 60's est, comme tu le soulignes, simpliste mais à un moment de notre adolescence, on s'est tous retrouvé dans un clan ou dans l'autre. Alors finalement, étais-tu "Beatles" ou plutôt "Rolling Stones" ?
Philippe:Ni l'un ni l'autre en fait. J'ai commencé par adorer les Beatles que j'ai découverts en 1964 avec leurs fameux I Want To Hold Your Hand, Can't Buy My Love et A Hard Day's Night. Puis la déferlante de singles a continué de plus belle en 1965, complétée par la parution des albums Help et Rubber Soul. Aucune concurrence de ce niveau n'existait à cette période. Comme beaucoup à l‘époque, la sortie fracassante du 45 tours I Can't Get No des Rolling Stones m'a accaparé et obsédé, comme beaucoup. Mais cela ne suffisait pas vraiment à faire basculer ma préférence pour les Rolling Stones, même si j'appréciais beaucoup The Last Time et Get Off My Cloud. En 1966, du haut de mes onze ans, ma préférence alla tout naturellement vers l'album Revolver des Beatles plutôt qu'Aftermath des Stones, que j'ai préféré ensuite au fil des années. En 1967, la sortie de Sergent Pepper's et l'escadron de 45 tours extraits de Magical Mystery Tour creusent encore l'écart pour moi entre les Beatles et les Rolling Stones. Cependant, à partir de 1968, un troisième groupe anglais est entré dans la compétition Beatles/Rolling Stones : The Who. La parution successive de grands albums comme Sell Out (1967), Tommy (1969), Live At Leeds (1970) et Who's Next (1971), ajoutée à leur jeu de scène époustouflant ont radicalement changé la donne pour moi en tant que groupe préféré, durant deux décennies. La séparation des Beatles en avril 1970 - lesquels, de surcroît, avaient arrêté prématurément les concerts en aout 1966 - changea à nouveau la donne. Jimi Hendrix et son œuvre me fascinaient également au plus haut point, mais sa mort prématurée en septembre 1970 le mit également hors compétition à l'aube de cette nouvelle décennie. En définitive, je fus donc plutôt Who ! au passage premier groupe punk de l'histoire Rock, entre autres, avec son fracassant single My Generation paru en 1965 suivi par des prestations scéniques non moins explosives. Pour la petite histoire, c'est Pete Townshend (leader incontesté du groupe, après bien des combats avec son chanteur charismatique) qui prononça le premier le mot Punk en 1973 dans l'album-concept Quadrophenia. Un nouveau "Game of Thrones" du rock avait vu le jour avec quatre puissants prétendants, à savoir Les Rolling Stones, les Who, Pink Floyd et Led Zeppelin.
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