Ce trio capté live à Ghent se compose du saxophoniste Ben Sluijs, du bassiste attitré de son quartet Piet Verbist et du guitariste Hendrik Braeckman. Le répertoire choisi comprend des standards comme Alone Together composé en 1932 par le Newyorkais Arthur Schwartz, Witchcraft de Sy Coleman, Portrait in Black and White d'Antonio Carlos Jobim, un titre du pianiste Phil Markowitz et une composition originale de chacun des membres du groupe. Au sein de cette formation intimiste, le saxophoniste, connu pour son lyrisme et son art de la ballade, est particulièrement bien mis en valeur. Le guitariste, qui joue sur un instrument fabriqué par le luthier belge Jacky Walraet (également partenaire de Peter Hertmans), a un son légèrement métallique, chaud et très mainstream, qui évoque à l'occasion celui de Philip Catherine. Si dans les solos, les notes se détachent claires et distinctes, son jeu en demi-teintes est également remarquable par les savants enchaînement d'accords qui enveloppent à merveille le son feutré de l'alto. A la longue, les trios sans batteur ont parfois tendance à se révéler banals mais ce n'est pas le cas ici : l'interaction entre les trois musiciens est constante et crée un environnement vivace et swinguant où chaque musicien est constamment poussé et mis en valeur par les deux autres. Piet Verbist en particulier, dont la contrebasse est bien mixée, fait preuve comme toujours d'un jeu rythmique sans faille et se réserve quelques superbes solos. Sa composition Rushd ed-Dunya a un parfum subtil d'Orient et balance comme une caravane de sel dans un désert sans fin. Cette musique pleine de ferveur et de lyrisme a le don d'étaler le temps. Elle ravira les amateurs de jazz et, par sa totale accessibilité, tous ceux qui souhaiteraient s'initier à une musique improvisée douce et imaginative, classique et moderne à la fois.