Gryphon (Transatlantic), 1973 Red Queen to Gryphon Three (Arista), 1974 ------------------------- Illustrations par Dan Pearce |
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Les amateurs de musique progressive raffolent de la Fantasy, des animaux fantastiques, des châteaux et des paysages exotiques où vivent les licornes et autres animaux du bestiaire médiéval. Cette imagerie colle bien à la musique de Gryphon, un groupe uniquement instrumental inspiré par la musique folklorique anglaise du Moyen Age et de la Renaissance, musique joliment arrangée et dominée par le basson et les guitares acoustiques. La pochette du premier LP représente comme il se doit un griffon, un animal mythique avec un corps de lion sur lequel sont greffées des ailes et une tête d’aigle. Ce sont eux qui servaient d’attelage à la nacelle d’Alexandre et gardaient les trésors d’Apollon dans le pays légendaire des Hyperboréens. L’image montre un griffon ramassant de l’or, métal qu’il utilise pour construire son nid. La pochette du troisième album, Red Queen To Gryphon Three, est la plus réussie avec ce vieillard jouant aux échecs devant un paysage médiéval féerique. Elle s’inspire du concept du disque qui tourne autour d’une partie d’échecs. L’auteur de ces images s’appelle Dan Pearce, un illustrateur anglais qui, dans le domaine qui nous intéresse, n’a pas produit grand chose d’autre. On pourra aussi retrouver sur le site réservé à Gryphon quelques caricatures amusantes des cinq membres du groupe réalisées par Pearce. |
The Visitor (Verglas Music) UK 1998 ------------------------- Artwork direction + Design par Hugh Syme |
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Superbe pochette due au talentueux Hugh Syme, également directeur artistique des albums de Rush et, entre autres, de Fates Warning, Queensrÿche et Uriah Heep. Sombre, menaçante avec un côté fantastique proche de l'univers du peintre Magritte, elle évoque l'au-delà, un univers de transition pour l'homme suspendu entre la vie et la mort après la rupture de la glace et sa chute dans l'eau froide. Le Visiteur, c'est cette ombre noire qui parcourt la lande sur un antique vélo et qui peut prendre les visages d'un prêtre, d'un voleur, d'un vampire ou d'un clown. C'est lui qui pardonne les péchés et qui en fin de compte décidera d'épargner la vie de l'imprudent promeneur en l'extirpant des eaux glaciales et silencieuces. |
Train of Thought (Elektra) USA 2003 ------------------------- Artwork par Jerry Uelsmann |
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La surprenante image de Train of Thought est empruntée à l’un des grands photographes du siècle : Jerry N. Uelsmann, né à Détroit en 1934, professeur d’Université retraité, lauréat de nombreux prix, exposé dans les musées du monde entier, objet de plusieurs monographies et membre de la vénérable « Royal Photographic Society » de Grande Bretagne. Uelsmann est connu pour ses montages photographiques ambigus qui déforment la réalité en juxtaposant des scènes ou des objets reconnaissables mais n’ayant apparemment aucune relation entre eux. En fait, l’image reproduite au recto de la pochette est la moitié supérieure d’un assemblage dont on peut découvrir l’intégralité sur le site de l’auteur, la moitié inférieure étant constituée de deux mains tenant un album de photos qui sont elles-mêmes des montages. Cette photo est un hommage à Max Ernst (1891-1976), peintre d’origine germanique qui fut le précurseur du Surréalisme. D’autres photographies célèbres de Uelsmann sont reproduites à l’intérieur du livret, toutes dans le style de l’artiste : des combinaisons de personnages, de mains, d’arbres, de nuages, de châteaux de sable et autres éléments qui composent des fresques fantasques et surréalistes plus insolites les unes que les autres. Le plus étonnant est que ces juxtapositions sont construites sans recours à l’ordinateur mais plutôt par un travail d’alchimiste en chambre noire considérée par l’artiste comme un véritable laboratoire de recherche audiovisuelle. Le résultat est étonnant tant ces tableaux singuliers provoquent une réaction immédiate chez ceux qui les regardent. Dream Theater en choisissant ces images pour illustrer leur nouvel opus n’aurait pu faire un meilleur choix : elles transportent le futur auditeur dans un monde parallèle, inconnu, menaçant et le placent instantanément dans un état émotionnel qui le rend beaucoup plus réceptif à la musique sombre qui va s’emparer de lui. Avec celle du premier album de Black Sabbath, cette pochette constitue sans doute ce qu’on a fait de mieux dans le genre. |
The Sentinel (Inside Out) UK 1984 ------------------------- Artwork par Patrick Woodroffe |
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A cause de l'étrange clarté diffusant de la lumière céleste, la très belle image qui orne la pochette du CD fait immanquablement penser aux mondes fantastiques de Roger Dean sans pour autant qu'elle puisse être confondue avec les œuvres du célèbre illustrateur de Yes. Elle se caractérise en effet par une minutie dans le détail des multiples scènes représentées telles la barque et le dauphin, la cité lacustre en forme de bulle ou ces drôles d'aréopages qui confèrent à l'ensemble un style passé futuriste parfois appelé steampunk par les amateurs de science-fiction. En ce sens, elle se révèle un univers de fiction moins glacé, plus vivant que celui de Dean. Ce dessin appartient à Patrick Woodroffe, un illustrateur anglais apprécié des amateurs et connu pour ses nombreuses oeuvres liées à la SF et au fantastique. La sélection de ce tableau pour ce premier grand disque de Pallas est judicieuse en ce qu'elle situe immédiatement la musique du groupe comme appartenant au grand courant progressif des seventies en voie d'extinction en ce début des années 80. Avec un peu d'imagination, on pourra aussi y voir une représentation du monde d'Atlantis à la base du concept de l'album. Dommange que Pallas n'ait pas continué sur sa lancée en collaboration avec ce peintre : ils auraient sans doute pu à eux deux constituer une nouvelle association images / musique d'une qualité comparable au fameux tandem Yes - Dean. |
Lex Rex (Arion Records) US 2002 ------------------------- Artwork par Rosana Azar |
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Originaire d’Argentine et membre de la communauté hispanique de Washington D.C. depuis 1990, Rosana Azar est une artiste au talent reconnu et apprécié dans de nombreuses expositions où elle exhibe ses toiles, essentiellement des peintures à l’huile, fortement influencées par l’école surréaliste européenne du début du vingtième siècle mais aussi par des peintres argentins contemporains. Elle se décrit elle-même comme un observateur de la réalité et du fantastique dans un monde de pensées interconnectées pleines d’énergie et de force créatrice. Déjà choisie par Steve Babb pour illustrer le premier disque de Glass Hammer inspiré par le Seigneur des Anneaux de Tolkien (Journey of the Dunadan), Rosana Azar est à nouveau sollicitée pour illustrer ce septième disque du groupe qui raconte l’histoire d’un centurion romain recherchant la source de la gloire depuis les champs de bataille des grandes forêts du Nord jusqu’aux temples de Rome avant de se retrouver sur le Golgotha face au Christ crucifié. Et le choix s’avère particulièrement judicieux. Cet homme mystérieux planant dans son habit de lumière évanescent a quelque chose de profondément spirituel qui met bien en évidence le côté religieux du concept. Plutôt que de sélectionner une image plus réaliste illustrant le monde romain ou la scène de la crucifixion (les images ne manquent pas), on a préféré rester dans un monde imaginaire flou mais terriblement suggestif. Après tout, comme le disait Alberto Giacometti, le but de l’art n’est pas de reproduire la réalité mais d’en créer une nouvelle de la même intensité. |
Feeding the Wheel (Magna Carta) US 2001 ------------------------- Artwork par David B. Mattingly |
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Né à Fort Collins dans le Colorado en 1956, David Burroughs Mattingly a une longue carrière derrière lui. Après avoir travaillé dans les studios de Walt Disney et contribué notamment à des films comme Tron ou Le Trou Noir, il s'est établi à son propre compte, illustrant plus de 500 couvertures pour des romans de fantasy ou de science-fiction et glanant à l'occasion divers prix récompensant ses oeuvres. Ayant récemment adopté l'ordinateur, la plupart des images, parfois animées, qu'il produit aujourd'hui combinent des peintures digitales avec des éléments conçus à l'aide de programmes graphiques en 3D. La station spaciale en forme de roue, figurant sur la pochette, paraît un motif récurrent dans les images de Mattingly comme on pourra le visualiser sur son site web (ou est notamment représentée une construction similaire dans un autre contexte relevant de la SF ainsi que dans une animation en Quicktime). Ici mixée avec une photo de l'artiste et divers autres symbôles, elle illustre la roue cosmique de la vie qui sous-tend le concept du disque. |
A Pleasant Shade of Gray (Metal Blade) US 1997 ------------------------- Art Direction par Ioannis & Steven Jacaruso |
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Contrairement à ce qui était annoncé au dos du CD promotionnel de A Pleasant Shade of Gray, Fates Warning n'a pas poursuivi sa collaboration avec le concepteur des pochettes de ses trois derniers disques, Hugh Syme, qui est ici remplacé par Ioannis Vasilopoulos. Fondateur en 1993 de la firme Vivid Images Worldwide (Connecticut) et connu pour la création de sites Web et la réalisation de posters et livrets musicaux (DVD, Vidéo et CD) pour des groupes comme King Crimson, Trey Gunn, California Guitar Trio, Jean-luc Ponty, Saga, Deep Purple, Yngwie Malmsteen ou Blue Oyster Cult, Ioannis est un illustrateur talentueux combinant la peinture traditionnelle, la photographie et, comme la plupart des grands designers modernes, des traitements digitaux sur ordinateur. La pochette de Pleasant Shade of Gray colle bien au concept de l'album, mélangeant des photographies d'ondes circulaires se propageant à la surface de l'eau avec des scènes floues où la pénombre grise règne à peine voilée par un trait de lumière indirecte. Ces ondes reviennent de façon récurrente sur les photographies à l'intérieur du livret : elles symbolisent la pluie qui rythme cette nuit de songe mais surtout le temps qui passe, « les saisons qui changent et les sables qui se réarrangent ». Le verso de la pochette, esthétiquement discutable, est une allégorie brodant sur le même thème : l'esprit qui médite à l'abri de la pluie qui tombe mais influencé par elle. Un livret fort original pour une œuvre qui ne l'est pas moins. |
(Vertigo), 1970 AFFINITY (Vertigo), 1970 ------------------------- Design & Photography by Marcus Keef |
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Marcus Keef est un désigner peu connu qui réalisa dans les années 70 quelques pochettes aussi superbes que mythiques pour des productions obscures de quelques groupes progressifs du légendaire label Vertigo (avec son fameux logo à base de cercles concentriques qui en tournant à la vitesse d’un 33 tours donne la sensation d’un vertige à la Hitchcock). Ses œuvres les plus réussies sont des photographies de personnages mis en scènes et placés dans des paysages dont la lumière est ensuite trafiquée par des filtres colorés quand il n’imprime pas carrément en négatif (Hannibal, 1970). Des groupes aujourd’hui disparus mais encore recherchés par les collectionneurs comme Beggar's Opera, Affinity, Colosseum, Warhorse, Nucleus, Hannibal et Cressida ont ainsi profité de sa vision en produisant des albums que l’on achetait plus sur les promesses de rêve suggérées par les incroyables images des pochettes doubles que pour la qualité parfois (mais pas toujours) décevante et médiocre de leur musique. Ce qui reste comme sa meilleure contribution à l’art des pochettes de disque est la photographie du premier album de Black Sabbath (pour qui il concevra aussi les pochettes des deux LP suivants). La dame devant l’étendue d'eau (avez-vous remarqué qu'elle tient un chat noir dans ses bras ?) est un modèle engagé pour l’occasion et la bâtisse à l’arrière-plan a été identifiée comme étant un ancien moulin à eau niché au bord de la Tamise. La couleur de la photographie, probablement altérée par un filtre rouge, varie en contraste et en nuance en fonction de la qualité des innombrables rééditions mais, en dépit des mauvaises reproductions, la photographie a gardé au fil des ans un pouvoir de séduction intact. L’atmosphère est étrange, surnaturelle, lugubre et prépare l’auditeur à ce qu’il va subir : le crépuscule tombe lentement, la pluie s’annonce, l’orage menace tandis que les cloches résonnent dans le lointain. Ozzy et les siens inventent le métal noir et entament leur lente descente aux enfers. |
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